INDEMNISER LE PRÉJUDICE D’AFFECTION DE LA VICTIME INDIRECTE (RICOCHET) D’UN ACCIDENT DE LA ROUTE
Préjudice moral victime indirecte | Préjudice moral victime par ricochet | Préjudice d’affection victime par ricochet
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Comment calculer le préjudice économique du conjoint survivant ?
1° Qui sont les victimes indirectes ou victimes par ricochet ?
Un accident de la circulation bouleverse tous ceux qui y sont confrontés. Le préjudice d’affection vient indemniser le préjudice moral des victimes indirectes. En effet, si la victime directe de l’accident a le droit d’obtenir l’indemnisation intégrale de ses préjudices, les victimes par ricochet ou victimes indirectes peuvent aussi être indemnisées au titre du préjudice d’affection, en fonction de la survie ou du décès de la victime directe.
Une victime indirecte ou une victime par ricochet d’un accident de la route est la victime qui n’était pas impliquée dans l’accident mais qui a été touchée tout de même par l’accident et particulièrement par ses conséquences en raison de sa proximité plus ou moins directe avec la victime directe.
Le dommage subit par la victime directe de l’accident de la route affecte alors la victime par ricochet (victime indirecte) en raison des liens forts qui les unissent. Un ou des liens unissent alors la victime directe et la victime indirecte.
« Aussi, les victimes indirectes ou victimes par ricochet pourront être un conjoint, ou même un concubin, des enfants, et petits-enfants, un père, une mère, des grands-parents, des gendres, et des belles-filles, des belles-sœurs, et des beaux-frères… et même des amis proches. » Avocat préjudice d’affection
Si un lien de parenté existe entre la victime de la route et un de ses proches, la qualité de victime indirecte (pour le proche) pour faire valoir la preuve de l’existence d’un préjudice d’affection se fera quasi automatiquement.
Désormais, de simples liens d’affection rapportés entre la victime d’un accident de la route et un ami, permettront à cet ami de revendiquer la qualité de victime indirecte, lui permettant alors de solliciter un préjudice d’affection. C’est la notion de « liens affectifs étroits » – arrêt récent du Conseil d’Etat du 3 juin 2019
« En prévoyant, depuis la loi du 9 août 2004, l’indemnisation au titre de la solidarité nationale des ayants droit d’une personne décédée en raison d’un accident médical, d’une affection iatrogène ou d’une infection nosocomiale, les dispositions précitées ouvrent un droit à réparation aux proches de la victime, qu’ils aient ou non la qualité d’héritiers, qui entretenaient avec elle des liens étroits, dès lors qu’ils subissent du fait de son décès un préjudice direct et certain. ». CE, sect., 3 juin 2019, req. n° 414098
La victime indirecte n’aura pas non plus à rapporter la preuve d’une vie commune avec la victime directe pour solliciter un préjudice d’affection puisque c’est seulement la qualité du lien affectif entretenu qui aura force de preuve (par tous moyens).
« ...le prix de la douleur » Avocat préjudice d’affection
2° Le décès de la victime directe et le préjudice d’affection de la victime indirecte
En cas de décès de la victime directe de l’accident de la route, le préjudice d’affection est le préjudice moral lié à la souffrance causée par le décès de la victime directe aux proches de cette dernière.
La nomenclature Dintilhac prévoit l’indemnisation du préjudice moral des proches, ou, préjudice d’affection : « Il s’agit d’un poste de préjudice qui répare le préjudice d’affection que subissent certains proches à la suite du décès de la victime directe. Il convient d’inclure, à ce titre, le retentissement pathologique avéré que le décès a pu entraîner chez certains proches. En pratique, il y a lieu d’indemniser quasi-automatiquement les préjudices d’affection des parents les plus proches de la victime directe (père et mère, etc.). Cependant, il convient également d’indemniser, à ce titre, des personnes dépourvues de lien de parenté, dès lors qu’elles établissent par tout moyen avoir entretenu un lien affectif réel avec le défunt ».
La Cour de cassation admet que le proche d’une victime directe décédée dans un accident de la route peut être indemnisé pour son préjudice d’affection, mais aussi pour ses propres préjudices liés à l’accident de la route (préjudice du deuil pathologique), sur le fondement du principe de la réparation intégrale. Cass. crim., 2 avr. 2019, n° 18-81.917 / A LIRE : LE PRÉJUDICE DU DEUIL PATHOLOGIQUE
Comme déjà expliqué dans le paragraphe précédent, une personne sans lien de parenté pourra être reconnue comme étant une victime indirecte ou victime par ricochet, et donc être indemnisée, si elle démontre l’existence d’un lien d’affection particulier avec le défunt. En revanche, un parent, même éloigné, de la victime directe (oncle, cousin…), n’a pas à rapporter la preuve de l’existence de ce lien comme précisé dans la Nomenclature Dintilhac et rapporté par un arrêt : Civ. 2e, 24 oct. 2019, n° 18-15.827
Une réserve est notamment posée, celle d’une absence totale de relation entretenue avec la victime directe de son vivant, résultant d’un fort éloignement géographique, d’une mésentente ou d’un conflit.
Cassé alors l’arrêt d’appel qui a exigé des « liens affectifs particuliers », alors que « la seule preuve exigible était celle d’un préjudice personnel direct et certain » (v. déjà, Civ. 2e, 16 avr. 1996, n° 94-13.613), en l’espèce établi par le sentiment de perte et de tristesse des demandeurs causé par le décès d’un membre de leur famille avec laquelle des relations, sans être étroites, existaient.
3° La survie de la victime directe, et le préjudice d’affection de la victime indirecte :
En cas de survie de la victime directe de l’accident de la route, le préjudice d’affection est le préjudice moral lié aux blessures, au handicap et aux souffrances de la victime directe.
Dès lors que la victime directe de l’accident de la route est gravement atteinte (lourd handicap, traumatisme crânien, tétraplégie, paraplégie, hémiplégie, traumatisme médullaire, amputation…), il est inconcevable qu’il n’y ait aucune répercussion sur les proches. La vie des proches de la victime lourdement handicapée est bouleversée et à ce titre, ne peut qu’être considéré à sa juste valeur, en préjudice extra patrimonial exceptionnel.
Pour exemple, il faudra indemniser les parents d’un enfant qui a eu un accident de la route et au cours duquel il a eu un violent choc au crâne. L’enfant, traumatisé crânien sévère, a eu sa vie bouleversée, et par voie de conséquence, ses parents également. Les parents, victimes par ricochet ou victimes indirectes pourront solliciter l’indemnisation alors de leur préjudice d’affection.
La cour de cassation est allée encore plus loin, puisqu’elle a sanctionné une cour d’appel qui avait relevé que le préjudice moral des proches à la vue de la souffrance de la victime directe était réservé aux hypothèses dans lesquelles ils (étaient) soumis au spectacle de la survie diminuée gravement handicapée de la victime directe : « qu’en statuant ainsi, alors qu’un préjudice moral ou d’affection ouvre droit à réparation dès lors qu’il est caractérisé, qu’elle que soit la gravité du handicap de la victime directe, la cour d’appel a méconnu le texte et le principe susvisé ; Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 14 novembre 2019, 18-10.794, Inédit
Enfin, la privation des rapports sexuels dans le couple, donc du conjoint (victime par ricochet), à cause des séquelles de la victime directe constitue un préjudice indemnisable.
4° A RETENIR : le préjudice d’affection de la victime indirecte
Les victimes directes, mais aussi alors les victimes indirectes ou victimes par ricochet, peuvent solliciter l’indemnisation des postes de préjudices. Aussi, le préjudice d’affection des victimes indirectes doit être indemnisé, et ce, que la victime directe survive ou décède, quel que soit le lien de parenté ou d’affection, et quelle que soit la gravité des séquelles de la victime directe.
A NOTER : Lors des Entretiens du dommage corporel 2023, Mr Samuel Ittah, conseiller à la 2ème Civ de la Cour de cassation, rappelait que cette chambre spécialisée dans le dommage corporel n’imposait ni la méthode classique ni la méthode par réaffectation lors du calcul du préjudice des victimes par ricochet. Elle contrôlait en revanche la justesse du calcul de chacune de ces méthodes.
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