L’EXPERTISE MÉDICALE JUDICIAIRE & PRÉJUDICES CORPORELS
Dommages corporels | Réparation des Préjudices corporels | Avocat expertise judiciaire
Une expertise médicale judiciaire en matière de réparation des dommages corporels est la désignation d’un médecin-expert avec telle ou telle spécialité, ordonnée par un juge.
Le médecin-expert, dans le cadre d’une expertise médicale judiciaire, devra lister les dommages corporels de la victime accidentée selon une mission de type Badinter fixée par le tribunal, et les évaluer dans un rapport d’expertise judiciaire. Le juge qui ne disposait pas de suffisamment d’éléments pour statuer (accidents assez graves) s’appuiera sur ce rapport d’expertise pour trancher le litige.
« Victimes, le Diable se cache dans les détails & l’expertise médicale judiciaire est le moment où un médecin-expert liste les détails ! » MB, Avocat en dommages corporels
→ Qu’est ce qu’une expertise médicale judiciaire ?
C’est L’article 145 du code de procédure civile qui va gérer l’expertise judiciaire puisqu’il dispose que :
« s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé ».
C’est donc sur ce fondement que l’avocat intervenant en réparation des préjudices corporels saisira alors le juge des référés (procédure du référé expertise), avant tout procès, pour faire désigner un médecin expert pour établir un rapport constatant les séquelles corporelles de la victime accidentée. Dans ses écritures, il ne manquera pas de solliciter une mission d’expertise particulière car protectrice des droits des victimes de la route : une mission d’expertise ANADOC.
→ Qui est l’expert judiciaire dans le cadre d’une expertise médicale judiciaire ?
Cette expertise judiciaire ou, expertise médicale judiciaire ou même, expertise médico-légale, peut aussi être ordonnée directement par le juge de la mise en état, au cours d’un procès.
Le juge peut désigner l’expert de son choix, soit sur une liste d’experts agréés à la cour d’appel, ou à la cour de cassation, soit librement, mais l’expert devra prêter serment.
La décision du juge qui ordonne la désignation d’un expert médecin et donc de l’expertise médicale judiciaire, énonce aussi le détail de la mission, le médecin ne disposant pas de la possibilité d’étendre sa mission sans autorisation préalable.
L’article 238 du code de procédure civile dispose notamment que :
« Le technicien doit donner son avis sur les points pour l’examen desquels il a été commis. Il ne peut répondre à d’autres questions, sauf accord écrit des parties. »
La Cour d’Appel de PARIS (CA Paris, Pôle 1, ch 2, 23 juin 2022, n°21/20479) valide la mission ANADOC sollicitée par l’avocat intervenant en droit du dommage corporel, (sauf // préjudice d’agrément).
Et rappelle que:
- « le juge des référés est libre de choisir la mission donnée à l’Expert et n’est pas tenu par les propositions des parties« ,
- la nomenclature DINTILHAC « n’a pas de valeur normative et les juges ne sont pas tenus de s’y référer, pas plus qu’ils ne sont tenus d’utiliser les « trames » ou « missions types » qu’ils ont pu établir par le passé, s’agissant de simples outils d’aide à la décision et à la rédaction« .
Le juge déterminera et fixera aussi, le montant de la provision à payer à l’expert désigné à titre de provision.
Souvent, la victime de l’accident devra consigner ladite somme afin que la mission de l’expert commence le plus tôt possible. (article 269 du code de procédure civile).
Aussi, souvent, l’avocat de la victime sollicitera dans le même temps que la désignation d’un expert, l’allocation par l’assurance d’une provision financière pour faire face aux premières dépenses, et pourra même solliciter en outre une provision complémentaire pour payer justement la provision due à l’expert fraichement désigné.
Ce sont les articles 143 et suivants du code de procédure civile et 232 et suivants du Code de procédure civile qui vont régir les droits et obligations des participants (médecin expert judiciaire, victime, assurance, médecin conseil de victime, médecin expert d’assurance).
Le médecin expert judiciaire désigné à cette possibilité de se faire assister par la personne de son choix, sous son contrôle et sa responsabilité (article 278-1 du code de procédure civile). En général il s’agira d’un confrère spécialisé dans un autre domaine médical que le sien – Il s’agit d’un sapiteur médecin.
L’expertise se tiendra en présence de l’expert médecin judiciaire et du sapiteur désigné, de l’avocat de la victime, du médecin-conseil de la victime, de l’avocat de la compagnie d’assurance, du médecin-conseil de l’assurance.
Une préparation de la victime en amont (visite médicale) avec le médecin-conseil de la victime est essentielle pour aborder sereinement cette expertise (consultez le guide de l’expertise ?).
→ Comment se déroule l’expertise médicale judiciaire ?
L’expertise se déroulera selon les étapes suivantes au cabinet du Médecin expert judiciaire, ou, dans les cas de lourds handicaps, directement au domicile ou sur le lieu d’hospitalisation :
- Fixation du cadre de l’expertise et de ses limites
- Résumé de l’environnement socioprofessionnel de la victime
- Rappel des faits & des circonstances de l’accident
- Résumé de l’ « histoire » de la « maladie » (terme utilisé même si accident)
- Énumération des pièces du dossier (médicales, administratives et autres)
- Doléances de la victime (difficultés, évolution…) et examen clinique (en présence des médecins exclusivement)
- Discussion entre toutes les parties
- Pré-rapport & Rapport en fonction de la mission
→ Les parties peuvent-elles discuter avec le médecin-expert judiciaire au cours de l’expertise médicale judiciaire ?
Les missions d’expertise exigent que le médecin expert judiciaire notifie aux parties (victimes, avocat préjudices corporels, assurance) un pré-rapport de façon à recueillir les observations des parties avant l’émission du rapport définitif.
A LIRE : LE GUIDE DE L’EXPERTISE
L’expert judiciaire devra porter une attention particulière à ces observations car il devra apporter une réponse à chacune d’elles, à la condition que cela entre dans le cadre de sa mission.
A LIRE AUSSI : DIFFÉRENCE ENTRE LES EXPERTS & MÉDECINS-CONSEILS
Aussi, tout au long de la procédure d’expertise médicale, les parties pourront adresser des observations techniques (avec l’aide du médecin-conseil de victime et de l’avocat de la victime) et juridiques, appelées « dires », afin d’attirer l’attention du médecin expert judiciaire sur d’éventuelles erreurs d’appréciation, sur des préjudices non mentionnés, sur des douleurs sous évaluées et pourront prendre position sur l’orientation des conclusions du rapport médical.
Les « dires » ou observations écrites devront être joints au rapport définitif du médecin expert judiciaire avec les réponses apportées par ce dernier.
Pour exemple, un médecin expert judiciaire retient, pour le poste concernant la tierce personne, 6 heures actives et 8 heures de présence. Néanmoins, le médecin conseil de victime et son avocat estiment que le poste est sous-évalué, compte tenu de l’état de santé et aux besoins de la victime. Alors, ils adresseront un « dire » afin de tenter de réévaluer à la hausse ce poste avec quelques arguments. Un des arguments serait de mettre en avant que la victime ne pouvant se déplacer seule, aurait besoin d’une présence passive pour toute la nuit au cas où elle souhaiterait se rendre aux wc. La compagnie d’assurance et son conseil pourraient bien entendu, répliquer avec un « dire » orienté de façon différente.
Le rapport définitif est alors notifié à tous les participants ainsi qu’au juge.
Si ce rapport définitif reste critiquable le jour de l’audience au fond, il est assez rare que le juge accepte de déroger aux conclusions voir même, de considérer qu’un préjudice non listé dans le rapport aurait été oublié, d’où l’importance de se faire assister par un médecin-conseil de victimes en expertise. Différents outils sont utilisés tels que la Nomenclature Dintilhac, des barèmes référentiels de préjudices ou barèmes de capitalisation, et autres qui vont en fonction de l’outil utilisé, favoriser ou défavoriser la victime de la route (barème du concours médical, Barème d’indemnisation et référentiels des Cours d’appel, barème de capitalisation de la Gazette du Palais). Par exemple, le barème d’indemnisation ou de capitalisation de la Gazette du Palais favorise la victime lorsque ce dernier est appliqué stricto sensu.
Il est alors envisageable de présenter au juge un autre rapport d’expertise, un autre avis ou quelques recherches et ce, dans un seul objectif : l’intérêt de la victime de l’accident de la route pour son indemnisation intégrale.
Un bon avocat dommages corporels fera la différence !
Analyse de votre dossier d’accident de la route, sans engagement de votre part
→ Les parties peuvent-elles contester les conclusions de l’Expert judiciaire dans le cadre d’une expertise médicale judiciaire ?
Les parties pourront toujours soulever la nullité des décisions et actes d’exécution relatifs aux mesures d’instruction tels qu’un rapport d’expertise dans le cadre d’une expertise médicale judiciaire.
Cass. Civ. II, 24 novembre 1999, n° 97-10572 : « une violation du principe du contradictoire portant une grave atteinte aux droits de la défense » ;
Cass. Civ. II., 23 février 2005, n° 03-12226 : « l’absence d’information du résultat de ses opérations par l’expert afin de les inviter à présenter leurs observations écrites.«
Les opérations irrégulières pourront être régularisées ou recommencées si le vice qui les entachait pouvait être écarté.
Dans le cas où le juge constatait la nullité de la mesure confiée au technicien ou à l’expert-judiciaire, il pourrait soit ordonner une nouvelle mesure, soit statuer sans s’appuyer sur l’avis du technicien, soit enfin, utiliser le rapport, le constat ou la consultation du technicien à titre de simple renseignement.
Pour l’ensemble de ces raisons, les parties, par l’intermédiaire de leurs avocats, doivent assurer un suivi actif des opérations d’expertise et, le cas échéant, faire réaliser des expertises contradictoires, adresser leurs dires ou solliciter la nullité des actes réalisés par le technicien ou l’expert judiciaire.
L’expert judiciaire adressera alors sa note financière définitive et le juge tiendra compte notamment des diligences accomplies, du respect des délais impartis et de la qualité du travail fourni (article 284 du code de procédure civile).
Les parties pourront contester le montant des honoraires arrêté par le juge si elles estimaient que l’expert n’avait pas rempli sa mission dans le cadre de l’expertise médicale judiciaire.
