FRAIS DE LOGEMENT ADAPTĂ OU FRAIS D’ACQUISITION DU LOGEMENT POUR LES VICTIMES EN SITUATION DE HANDICAP
Indemnisation des victimes en situation de handicap
La jurisprudence sur les frais d’acquisition du logement pour les victimes en situation de handicap
Monsieur Jean-Jacques X a Ă©tĂ© victime dâun grave accident de la route le 1er janvier 2000. Il a Ă©tĂ© atteint dâune paraplĂ©gie et a nĂ©gociĂ© avec lâassurance du vĂ©hicule impliquĂ© une indemnitĂ© consĂ©quente mais nâincluant pas un certain nombre de postes relatifs aux amĂ©nagements immobiliers, du vĂ©hicule automobile et des appareillages.
Le poste de frais de logement adaptĂ© a pour vocation dâindemniser les sommes nĂ©cessaires Ă la victime handicapĂ©e pour pouvoir habiter de nouveau un logement.
Monsieur Jean-Jacques X a acquis par la suite un logement mais lâassurance (MATMUT) a refusĂ© catĂ©goriquement de prendre en charge le coĂ»t intĂ©gral de cette acquisition aux motifs que seul les amĂ©nagements devaient ĂȘtre indemnisĂ©s. Selon lâassurance, dans la mesure oĂč la victime aurait dans tous les cas, avec ou sans prĂ©judices corporels, dĂ» se loger, il ne faudrait indemniser que la part correspondant Ă lâamĂ©nagement du logement au handicap. Lâassurance souhaitait alors limiter son indemnisation Ă la somme de 30.281,39 euros correspondant alors aux frais dâadaptation de logement. Lâassurance a obtenu gain de cause, tant en premiĂšre instance que devant la Cour dâappel de Rouen. NĂ©anmoins, la Cour de cassation a tranchĂ© dans le sens de la victime tĂ©traplĂ©gique.
La deuxiĂšme chambre civile de la Cour de cassation dans un arrĂȘt du 3 mars 2016 (n°15-16.271, RCA du juin 2016) a prĂ©cisĂ© quâ :« en limitant ainsi lâindemnisation de M.X⊠au seul coĂ»t des amĂ©nagements de son habitation, alors quâelle constatait que, du fait des sĂ©quelles de lâaccident, la nĂ©cessitĂ© de lâacquisition par la victime dâun logement adaptĂ© nâĂ©tait pas discutable, ce dont il rĂ©sultait quâune telle acquisition Ă©tait une consĂ©quence de lâaccident, la Cour dâappel nâa pas tirĂ© les consĂ©quences lĂ©gales de ses constations et Ă violĂ© le principe susvisĂ© ».
La Cour de cassation dans cet attendu fait bien sĂ»r rĂ©fĂ©rence au principe de la rĂ©paration intĂ©grale. Cet arrĂȘt prĂ©cise que lâassureur dĂ©biteur de la dette indemnitaire doit, en vertu du principe de rĂ©paration intĂ©grale, indemniser la victime de lâensemble des dĂ©penses nĂ©cessaires Ă lâamĂ©nagement du logement de cette derniĂšre, quand bien mĂȘme cela impliquerait lâachat dâun logement.
Cet arrĂȘt confirme un courant jurisprudentiel repris dans quelques arrĂȘts : Cass civ 2, du 9 octobre 1996; Cass crim du 10 janvier 2006; Cass civ 2, du 11 juin 2009; Cass du 3 novembre 2011; Cass civ 2, 14 avril 2016; Cass civ 2, du 2 fĂ©vrier 2017; Cass civ 2, 18 mai 2017-11-29
Dans chacun de ces arrĂȘts, les juges suprĂȘmes ont estimĂ© que les frais dâacquisition et dâamĂ©nagement de la maison exposĂ©s par la victime Ă©taient en relation directe avec lâaccident et devaient ĂȘtre pris en charge en totalitĂ© par le responsable.
« Ce ne sont pas juste les frais d’adaptation du logement qui devront ĂȘtre payĂ©s Ă la victime handicapĂ©e mais bien les frais d’acquisition du logement ! » Avocat en droit du dommage corporel
â Cass. 18 mai 2017 n°16-15.912
« DĂšs lors que lâacquisition dâun logement adaptĂ© au handicap de la victime est une nĂ©cessitĂ© pour lui permettre de vivre dĂ©cemment, le principe de la rĂ©paration intĂ©grale commande de lâindemniser tant des frais dâacquisition que des frais dâamĂ©nagements dudit logement (…)«Â
â Cass. civ. 2eme du 9 octobre 1996 n°94-19 763 :
« Lâusage dâun fauteuil roulant pour la victime exigeait un changement de domicile et lâacquisition dâun logement de plain-pied, avec rez-de-chaussĂ©e amĂ©nageable comportant notamment des accĂšs sanitaires, ce qui impliquait Ă la charge du responsable de lâaccident, la prise en charge du coĂ»t de lâacquisition et de lâamĂ©nagement dâun tel logement ».
â Cass. Crim du 10 janvier 2006 n°05-842256 :
« Attendu que pour rĂ©parer le prĂ©judice de la victime (âŠ) de lâobligation de recourir pour tous ses dĂ©placements, Ă lâutilisation dâun fauteuil roulant exigeant un changement de domicile, lâarrĂȘt attaquĂ© lui alloue une indemnitĂ© correspondant au montant de lâacquisition et de lâamĂ©nagement dâun logement adaptĂ© Ă cette nĂ©cessité ».
â Cass. civ 2eme du 11 juin 2009 n°08/11127 :
« Quâen statuant ainsi, tout en constatant que du fait des sĂ©quelles, Monsieur X sâĂ©tait retrouvĂ© dans lâimpossibilitĂ© de choisir entre lâacquisition ou la location dâun logement, dĂšs lors que son handicap rendait nĂ©cessaires des amĂ©nagements de son logement incompatibles avec le caractĂšre provisoire dâune location, ce dont il rĂ©sultait quâune telle acquisition Ă©tait une consĂ©quence de lâaccident ».
â Cass civ du 5 fĂ©vrier 2015 n°14/16015Â
« Que de ces constatations et Ă©nonciations, procĂ©dant de son apprĂ©ciation souveraine des Ă©lĂ©ments de preuve produits aux dĂ©bats, la cour dâappel a pu dĂ©duire que les frais dâacquisition et dâamĂ©nagements de la maison exposĂ©s par la victime Ă©taient en relation directe avec lâaccident et devaient ĂȘtre pris en charge en totalitĂ© par Monsieur Y, indĂ©pendamment de lâĂ©conomie rĂ©alisĂ©e par le non-paiement ».
â Cass. civ 2 Ăšme  du 14/04/2016 N°15.16625 et 15.22147 :
« Mais attendu que la rĂ©paration intĂ©grale du prĂ©judice liĂ© aux frais de logement adaptĂ© commande que lâassureur prenne en charge les dĂ©penses nĂ©cessaires pour permettre Ă la victime de bĂ©nĂ©ficier dâun habitat adaptĂ© Ă son handicap (âŠ). Quâayant constatĂ© que Monsieur Z qui nâĂ©tait pas propriĂ©taire de son logement avant lâaccident ; avait dâabord Ă©tĂ© hĂ©bergĂ© chez ses parents dont le logement avait dĂ» ĂȘtre amĂ©nagĂ© pour le recevoir, puis une fois son Ă©tat consolidĂ© avait achetĂ© une maison adaptĂ©e Ă son handicap, la cour dâappel qui nâavait pas Ă procĂ©der Ă la rechercher visĂ©e Ă la premiĂšre branche, en a exactement dĂ©duit que lâassureur devait garantir la victime de lâintĂ©gralitĂ© des dĂ©penses occasionnĂ©es par cet amĂ©nagement puis par cet achat ».
â Cass. civ 2eme du 18 mai 2017 n°16-15.912 :
« Mais attendu quâayant relevĂ© que M. X…, qui Ă©tait ĂągĂ© de 26 ans au jour de lâaccident, rĂ©sidait au domicile de ses parents, lequel est devenu inadaptĂ© aux besoins de son handicap, que lâimportance de ce handicap et lâusage permanent dâun fauteuil roulant justifient, selon le rapport dâexpertise, des amĂ©nagements du logement suffisamment lourds pour quâils soient incompatibles avec le caractĂšre provisoire dâune location, que le changement de lieu de vie nâest donc pas un choix purement personnel mais a Ă©tĂ© provoquĂ© par les sĂ©quelles de lâaccident, quâil nâest dâailleurs pas dĂ©montrĂ© que le coĂ»t financier de lâacquisition dâun immeuble dĂ©jĂ construit et de ses travaux dâadaptation soit infĂ©rieur Ă lâoption prise par la victime de faire construire en tenant compte des contraintes matĂ©rielles de son handicap,
que les frais que M. X… a dĂ» engager pour acquĂ©rir un terrain et faire construire un logement adaptĂ© Ă son handicap sont directement imputables aux sĂ©quelles provoquĂ©es par lâaccident, la cour dâappel en a exactement dĂ©duit que la victime devait ĂȘtre indemnisĂ©e des frais dâacquisition dâun logement adapté ».
Par consĂ©quent, dĂšs lors que le handicap de la victime rend nĂ©cessaire lâacquisition dâun logement, notamment au regard de la gravitĂ© de son handicap, lorsque celle-ci est locataire de son logement, et du fait de la lourdeur des amĂ©nagements nĂ©cessaires, les frais dâacquisition dudit logement doivent ĂȘtre intĂ©gralement pris en charge par le dĂ©biteur de lâindemnisation.
A LIRE : COMMENT SONT ĂVALUĂS LES FRAIS D’ADAPTATION DU LOGEMENT ?
â La jurisprudence de la Cass, Civ 2, 23 mai 2019, n°18-16.651,
Logement adaptĂ© – Frais dâacquisition si nĂ©cessaire pour habitat pĂ©renne « Attendu que, pour dĂ©bouter M. P… Y… de sa demande de prise en charge des frais d’acquisition en pleine propriĂ©tĂ© d’une maison d’habitation au titre des frais de logement adaptĂ© et limiter l’indemnisation Ă la somme de 86 000 euros, l’arrĂȘt retient qu’il est Ă©tabli par le rapport de l’expert que des travaux, certes importants mais nĂ©anmoins adaptĂ©s, peuvent ĂȘtre entrepris dans le cadre de son logement actuel ; Qu’en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y Ă©tait invitĂ©e, si, compte tenu de l’importance de ces travaux d’amĂ©nagement et du caractĂšre provisoire de la location, l’acquisition d’un logement mieux adaptĂ© n’Ă©tait pas nĂ©cessaire pour permettre Ă la victime de bĂ©nĂ©ficier de maniĂšre pĂ©renne d’un habitat adaptĂ© au handicap causĂ© par l’accident, la cour d’appel n’a pas donnĂ© de base lĂ©gale Ă sa dĂ©cision  ».
â La jurisprudence du Conseil d’Etat sur les frais d’acquisition du logement pour les victimes en situation de handicap – CE, 5Ăšme chambre, 27 dĂ©cembre 2019, n°421792
Le Conseil d’Etat a prĂ©cisĂ© quâ : « En second lieu, en estimant, pour Ă©carter le prĂ©judice du coĂ»t d’acquisition d’un logement de plain-pied adaptĂ© Ă l’Ă©tat de M. C…, que ce dernier n’apportait pas d’Ă©lĂ©ment probant de nature Ă Ă©tablir qu’il ne pourrait prendre un tel bien en location, la cour a portĂ© sur les piĂšces du dossier qui lui Ă©tait soumis une apprĂ©ciation souveraine, exempte de dĂ©naturation. Elle a pu, sans erreur de droit, en dĂ©duire que les frais d’acquisition d’un tel logement ne constituaient pas un prĂ©judice en lien direct avec la faute mĂ©dicale commise Ă l’Ă©gard de l’intĂ©ressĂ©. ».
La victime accidentée en situation de handicap doit prouver que la location est impossible dans son cas (refus du propriétaire par exemple)
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